Ode au jasmin

Tes yeux me sont au cœur des pierres enchâssées,
Et les traits lumineux de leur vague regard
Brisent de feux vivants la nuit de mes pensées,
Ô présence immanente, ô Toi de toutes parts,

Toi qu'environne toute une rive si douce
Qu'un jour sans toi vécu ne m'est qu'un jour de fer,
Qui m'accable d'un poids que mon soupir repousse
Et qui s'achève en siècle accompli dans l'enfer...

Tandis qu'autour de moi tout ce qui vit m'irrite,
Et qu'en moi l'œuvre même est un songe importun,
Vers toi, je fuis vers Toi, comme un oiseau s'abrite,
Et l'âme obéissante à ton secret parfum,

Je respire en esprit la plus tendre des chambres,
Où dans le linge pur, près des fleurs, près du feu,
La puissance d'amour qui rêve dans tes membres
Du sourire que j'aime accueillera mon vœu.

Je dissipe la route, et volant au délice,
J'abolis sous mes pas les degrés précieux
Qui portent jusqu'au seuil de ton précieux calice
Ma soif de retrouver tes véritables yeux.

Mon attente d'amour est lasse de les feindre ;
Je les veux boire et clore et les voir doucement
Se rouvrir, quand l'excès du bonheur de se joindre
Nous permet de sourire à ton frémissement.