Souvenir ou autre repas de famille

Quand j’étais tout petit, nous dînions chez ma tante,
le jeudi soir ; papa la jugeait dégoûtante
à cause d’un lupus qui lui mangeait le nez :
ce m’est un souvenir si doux que ces dîners !

Après le pot-au-feu, la bonne, Marguerite,
apportait le gigot avec la pomme frite
classique et c’était bon ! je ne vous dis que ça !
Chacun jetait son os à la chienne Aïssa.

Moi, ce que j’aimais bien c’est andouille de Vire ;
je contemplais (ainsi que Lamartine Elvire)
sur mon assiette à fleurs les gros morceaux de lard,
et je roulais des yeux béats de papelard
et ma tante disait : « Mange donc, niguedouille ! »...
ô Seigneur, bénissez ma tante et son andouille !