Une nymphe s’est retournée
Dans le sel rouge de l’automne.
Une chrysalide a brillé
Dans l’échaudé de la fumée.
Une ville ! Une ville encore,
Qui regarde à travers sa toile,
Avec ses portraits de résine,
Le fourmilier mangeur d’étoiles
Qui lutte pour la fin du miel
Avec la phalène de fer
Qui pousse son soc dans le ciel.
Le feu tinte dans la cuisine.
L’homme fait rire sa poupée.
Le phare s’étire dans l’ombre
Qui prend le large comme un pauvre.
Jadis je me suis arrêté
Vers le soir, en plein cœur d’été,
Sous une porte sans vantail
Où l’on buvait des cours profondes
Aux pas pressés, aux têtes fausses,
Des boutiques à l’air sauvage,
Des objets vénéneux et vagues
Que je tremblais de me nommer.
Un soir, je me suis arrêté
Devant la porte condamnée
Où l’on entend de la musique.
Mon cœur battait. J’avais sauté
Dans le retrait, dans le détour
Où brille un secret mal couvert.
Mais au bout d'un couloir j'ai vu
L’ombre, assise en tailleur, attendre
Sous l’aisselle d’une araignée.
Le long du couloir encrassé
Par un ébroûment de corbeaux,
Dans une gare de ceinture,
Au coup de tambour de la porte
Rebattue et questionnée
Par l’œuf pourri de la fumée,
Sous l’œil gradué des balances
Qui reflète le cimetière
Où la marchande de journaux
Pleure son fils dans son fichu,
Le long de la douleur j'ai bu
Le souffle cave des trains pauvres
Qui dorment en changeant de mouches
Dans la fosse pleine de graisse
Où la nuit bougonne en gouttant.
Comme eux, je roule mon calvaire,
Comme eux, je gagne la chapelle
Entre des files de malades.
Je fais comme les camarades.
Reviens. Sauve ton pauvre enfant
Qui pleure par tes yeux absents.
Parle-moi du fond de l’étang
Ou du faite du ciel s'il est
Construit des restes de la terre.
Je suis petit. Tu es si grand.
C’est fait. J’adopte tes idées.
Je reconnais que ma misère
Venait des désirs que j'avais.
Tu vois, je suis calme et j'espère.
Fais-moi quitter mon corps visible.
J’escaladerai les échelles
Des épreuves et des blessures,
Je traverserai les systèmes,
Incube de tous les soleils,
Goutte de feu, goutte de boue,
Dans ma soif de te reconnaitre.
Sans toi, sans ta douceur sévère,
Ma vie est le rêve d'un rêve
Hanté de fantômes trop tendres.
Dans la ville qui se rend sourde
Comme un fruit plein de perce-oreilles,
Devant le mur où je regarde,
Tableau de concours de la mort,
Sous le battoir de la parole,
Dans le ramage de l’esprit,
Dans la bauge où je déshabille
L’algue et la marne de l’amour,
Dans le battement où me plonge
Le coup de canon de la mer
Que je reçois comme un message
Sur l’égarement de mon cœur,
J’ai besoin de ton injustice.
Je suis, sans toi, je suis, sans elle
Comme un cadavre d’inconnu
Les cheveux trempés de sueur
Collés sur un front bleu de plomb
Tombé sur la terre étrangère
Au milieu d'un rassemblement
Qui ne comprend pas son visage.